Citation d’Émile-Auguste Chartier, dit Alain.
Depuis les premiers textes de l’Antiquité, le courage a toujours été considéré comme la principale vertu du héros. Chaque temps de guerre ou de crise met en valeur ces femmes et ces hommes qui, défiant les dangers, sauvent des vies, terrassent l’adversaire, réalisent l’impossible.
Mais qu’est-ce que le courage si ce n’est la capacité à surmonter ses peurs ? N’est-il pas l’aveu même de sa fragilité et de sa mortalité ? Le courage est l’apanage des héros, les dieux immortels
n’en ont nul besoin.
Si le courage est nécessaire, c’est donc que la peur est déjà là, avec son cortège de rejetons ombrageux et funestes : la défiance, le repli sur soi, la haine de l’autre, les préjugés, la lâcheté, la violence, le mépris, le mensonge, l’égoïsme, la superstition. La peur, telle Attila, envahit tout, s’étend comme la peste à la vitesse du vent sans qu’aucune armée ni qu’aucun confinement ne puisse l’arrêter.
Le seul combat possible contre la peur se déroule en amont, avant qu’elle ne s’installe, et selon deux méthodes.
Tout d’abord en réduisant le flou et l’incertitude. Il s’agira alors de diffuser largement et régulièrement les informations sur l’évolution de la situation et les changements en cours, avec simplicité et franchise, en répondant aux questions, en disant ce que l’on sait, en disant ce que l’on fait et ce que l’on va faire.
Dans les contextes d’incertitude, le manager n’a pas d’autre choix que d’aller au-devant des interrogations, sans attendre d’avoir réponse à tout. Il vaut mille fois mieux dire que l’on ne sait pas, que ne rien dire du tout. Rien de tel pour accroître l’inquiétude que l’ombre et le silence ; les auteurs de films d’épouvante le savent bien…
Ensuite en n’hésitant pas à évoquer de façon répétée les facteurs à l’origine de la peur, à rappeler les comportements à adopter et les procédures à suivre si l’évènement redouté survient. Préparons-nous au pire en osant le nommer et en sachant y faire face, avec calme et intelligence. L’échange et le débat fréquents feront de l’objet de peur un sujet familier que l’on aura appris à apprivoiser et à dominer, sans nécessairement chercher à l’anéantir par la violence.
A propos des auteurs cités
Alain, de son vrai nom Émile-Auguste Chartier, 1868 -1951, est un philosophe, journaliste, essayiste
et professeur de philosophie français.
La peinture La Horde est de Marx Ernst, 1891-1976, artiste allemand naturalisé américain en 1948 puis français en 1958, dont l’œuvre se rattache aux mouvements dadaïste et surréaliste.
Jérôme Lanvin
Directeur associé chez Reor